COMPRENDRE LA REGLEMENTATION
LA REGLEMENTATION DE LA PECHE EN QUELQUES MOTS
Nous savons tous que la réglementation de la pêche est touffue et peu lisible. Comme souvent dans le petit monde halieutique, la rumeur et les on-dit ont tendance à devenir force de loi.
L’objectif de ce document est de tenter de répondre à certaines questions simples que tout le monde s’est un jour posées.
Cette présentation simplifiée de la réglementation occulte quelques exceptions mais il ne s’agit pas ici de faire un cours de droit mais simplement d’expliquer les bases de la réglementation.
Le droit devient un outil au service de la préservation du milieu aquatique et du patrimoine piscicole qu’il abrite.
Cette mission d’intérêt général de préservation est assurée par :
- La Direction de l’Eau et de la Biodiversité, au sein du Ministère de l’Ecologie, de l’Energie et du Développement Durable et ses services extérieurs à la Direction Départementale des Territoires et de la Mer (D.D.T.M) et à la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (D.R.E.A.L).
- L’Etablissement Public du Bassin de la Dordogne (EPIDOR).
- L’Office Français de la Biodiversité (O.F.B).
- Les structures associatives de la pêche de loisir, constituées de 4200 Associations Agréées de Pêche et de Protection du Milieu Aquatique locales (les AAPPMA) rassemblant les pêcheurs à la ligne, de 44 Associations Départementales Agréées de Pêcheurs Amateurs aux Engins et Filets regroupant les pêcheurs amateurs aux engins et aux filets du Domaine Public Fluvial de chaque département (les ADAPAEF), de 92 Fédérations Départementales affiliant les AAPPMA et l’ADAPAEF (quand elle existe) avec au sommet de la pyramide la Fédération Nationale pour la Pêche en France et la protection du milieu aquatique (FNPF).
- Les Associations Agréées Départementales (ou Interdépartementales) de Pêcheurs Professionnels en Eau Douce (les AADPPED) regroupées en une Coordination Nationale des Association Agréées des Pêcheurs Professionnels en Eau Douce (CNAAPPED).
Aujourd’hui, quiconque veut pratiquer la pêche doit obligatoirement tenir compte de la classification des eaux, du droit de pêche et du droit de pêcher.
LES EAUX
L’eau est l’élément essentiel dans la pratique de notre loisir : sans elle, pas de poisson, pas de pêche.
Elle est classée en trois catégories :
- Les eaux libres.
- les eaux closes.
- Le cas particulier des piscicultures.
La conséquence directe de la qualification d’une eau est son assujettissement ou non à la police de la pêche.
- Les eaux libres :
Selon l’article L. 431-3 du code de l’Environnement, on appelle eaux libres, les fleuves, les rivières, les ruisseaux et les canaux, ainsi que les plans d’eau – étangs ou lacs – en communication avec le réseau hydrographique. Elles sont soumises à la Loi Pêche et donc aux dispositions du Code de l’Environnement
- Les eaux closes :
On appelle eaux closes les plans d’eau sans aucune communication avec les eaux libres ou dont la communication ne permet pas la vie piscicole. Le classement en eau close permet au propriétaire d’échapper à la Loi Pêche et donc aux dispositions du code l’Environnement, à l’exception des introductions d’espèces piscicoles.
Il faut noter que la possibilité de soumettre cette eau à la police de la pêche, est prévue à l’article L 431-5 du code de l’Environnement, mais que cette disposition est rarement utilisée par les propriétaires.
- Les piscicultures :
Dans les piscicultures, vouées à la « valorisation touristique », dont le bassin de pêche a une superficie égale ou supérieure à un hectare, le client qui y pêche à la ligne doit s’acquitter d’une taxe sans toutefois avoir l’obligation d’adhérer à une AAPPMA. Les conditions de pêche sont celles fixées par l’exploitant de la pisciculture. Les piscicultures, qui élèvent du poisson généralement à des fins économiques ou scientifiques, sont séparés du réseau hydrographique par des grilles permanentes empêchant la libre circulation du poisson. Elles sont implantées sur les eaux libres mais leur autorisation spécifique, délivrée par l’administration, leur donne un statut particulier de pisciculture où le poisson appartient au propriétaire des lieux.
LE DROIT DE PÊCHE
Pour pratiquer la pêche en un lieu, il faut d’abord que la personne détentrice du droit de pêche, accessoire du droit de propriété, en accorde l’autorisation.
On distingue deux grands cas de figure :
- Les eaux où le droit de pêche appartient à l’Etat.
- Les autres.
- Les eaux où le droit de pêche appartient à l’Etat
Il y a en ce domaine deux sous-catégories :
- Les eaux du domaine public de l’Etat.
- Les eaux du domaine privé de l’Etat.
Les eaux du domaine public sont définies à l’article 1er du Code du Domaine Public Fluvial et de la navigation intérieure. Il s’agit essentiellement :
- Des cours d’eaux navigables ou flottables, leurs bras, les dérivations, ainsi que les lacs navigables (si les terrains immergés ont été acquis par l’Etat), les rivières canalisées, les canaux de navigation…
- Des cours d’eaux, lacs et canaux qui, rayés de la nomenclature des voies navigables ou flottables, ont été maintenus dans le domaine public.
- Des cours d’eaux ou plans d’eaux appartenant au domaine public fluvial des collectivités territoriales.
Les cours d’eaux et les lacs appartenant au domaine public sont appelés cours d’eau et lacs domaniaux.
La grande difficulté pour le pêcheur est de retrouver ce qui relève effectivement du domaine public.
En fait, l’article 2-1 Code du Domaine Public précise que le classement au sien du Domaine Public se fait par arrêté préfectoral. Il convient donc, dans le doute, de se rapprocher de la préfecture qui doit pouvoir vous renseigner.
Pour être complet, il faut signaler que l’Etat possède aussi le droit de pêche dans les retenues des barrages gérés par EDF en vertu d’une convention de 1954 (idem pour la SNCF), ainsi que dans certains plans d’eaux intérieurs appartenant au domaine privé de l’Etat.
Sur son Domaine Public, la gestion du droit de pêche par l’Etat se fait par voie d’adjudication, d’amodiation et de délivrance de licence individuelle, sur le fondement d’un cahier des charges pour l’exploitation du droit de pêche de l’Etat.
Ce cahier des charges précise que ces eaux sont divisées en lots dans lesquels l’Etat se réserve le droit de louer séparément son droit de pêche à la ligne et son droit de pêche aux engins et filets.
Pour la pêche de loisir, les lots peuvent être loués à des APPMA ou des Fédérations Départementales pour l’exploitation du droit de pêche à la ligne et à des pêcheurs amateurs aux engins et filets, par le biais de licences individuelles, pour l’exploitation de la pêche aux engins et filets.
Ainsi, après amodiation, le droit de pêche à la ligne de l’Etat est transféré aux AAPPMA ou aux FDAAPPMA et le droit de pêche aux engins et filets est donné individuellement aux pêcheurs amateurs aux engins et filets.
- La carte de pêche délivrée par les AAPPMA garantit, en plus son l’adhésion à l’AAPPMA, que le pêcheur à la ligne est en possession d’un droit de pêche à la ligne.
- La licence individuelle de pêche délivrée par les services gestionnaires de l’Etat ne certifie seulement que le pêcheur amateur aux engins et filets détient un droit de pêche aux engins et filets sur le lot concerné.
- Les eaux où le droit de pêche n’appartient pas à l’Etat
Elles sont communément appelées eaux non domaniales, et parfois abusivement « le domaine privé » (abusivement, car l’Etat possède lui aussi son domaine privé). Là aussi, deux cas de figures.
- Les cours d’eaux où les propriétaires riverains ont, selon l’article L435-4 du code de l’environnement, le droit de pêche chacun de leur côté jusqu’au milieu du cours d’eau ou du canal.
- Les plans d’eaux où le droit de pêche appartient au propriétaire du fonds, qui, rappelons le, peut revêtir trois statuts différents (eaux libres, eaux closes, et piscicultures).
Il convient à ce stade d’insister sur une confusion fréquente au bord de l’eau entre les eaux libres et le domaine public.
Dans ces eaux, la classification en eaux libres va entraîner l’application pleine et entière de la loi pêche, quelque qu’en soit le propriétaire. Toutefois, le droit de pêche appartient, comme nous venons de le voir, au propriétaire riverain ou du fonds, qui peut être un particulier ou une personne morale de droit privé.
Ce denier peut parfaitement se réserver et le droit de pêche et le droit de passage et n’a nulle obligation à ce titre, contrairement à une rumeur répandue, qui voudrait que la pêche dite banale (à une ligne) puisse s’exercer sur l’ensemble des cours d’eaux.
Le propriétaire gère donc son droit de pêche comme il l’entend :
- Soit en se le réservant.
- Soit en l’accordant à des tiers, sous la forme qu’il souhaite : bail écrit, acte notarié ou sous seings privés, voir simple permission écrite ou orale révocable à tout moment.
La disposition la plus sûre pour les pêcheurs (mais aussi bien souvent la plus onéreuse) consiste en la signature d’un bail sur le long terme, accompagnée d’une clause qui prévoie le droit de passage, source de conflit très fréquent entre pêcheurs et riverains.
LE DROIT DE PÊCHER
Une fois que le propriétaire du droit de pêche est identifié, il convient de vérifier que toutes les conditions sont réunies pour pouvoir exercer ce droit en toute quiétude.
Les conditions mises à l’exercice de la pêche sont évidemment applicables là où s’applique la loi pêche, c’est-à-dire dans les eaux libres et sont spécifiées, entre autre, dans l’article L 436-1 du Code de l’Environnement :
« Toute personne qui se livre à l’exercice de la pêche doit justifier de sa qualité de membre d’une association agréée de pêche et de protection du milieu aquatique, d’une association agréée de pêcheurs amateurs aux engins et aux filets sur les eaux du domaine public ou d’une association agréée de pêcheurs professionnels, avoir versé sa cotisation statutaire et s’être acquittée de la redevance de Protection des Milieux Aquatiques visée à l’article L. 213-10-12. (C’est la RMA et pas la CPMA…).
Pour exercer le droit de pêcher, il faut :
- Adhérer à une association agréée de pêche (AAPPMA ou ADAPAEF):
Cette adhésion est indispensable, même pour les propriétaires riverains qui pêchent sur leurs propres lots. Il est à noter qu’il est indispensable de pouvoir présenter un document prouvant cette adhésion. C’est :
- La carte de pêche d’une AAPPMA pour un pêcheur à la ligne.
- La carte d’adhérent de l’ADAPAEF pour un pêcheur amateur aux engins et filets sur le Domaine Public Fluvial.
Lors de tout contrôle, un oubli est susceptible d’entraîner le paiement d’une amende de 1ière classe (article R 236-6 du C.E).
L’adhésion à une AAPPMA ou une ADAPAEF est conditionnée au paiement :
- De la cotisation statutaire.
- De la Redevance de protection des Milieux Aquatiques (RMA).
- De la Cotisation Pour les Milieux Aquatiques (CPMA).
- Avoir payé la RMA:
Le montant de la redevance est fixé par les Agences de l’Eau.
Cette redevance permet aux Agences de l’Eau de financer des actions de protection des milieux aquatiques et de verser une contribution à l’ONEMA.
Cette redevance est obligatoirement prélevée par les associations (AAPPMA et ADAPAEF), lors de l’adhésion à l’association, pour être reversée à l’Agence de l’Eau.
- Avoir l’autorisation ou la permission du détenteur du droit de pêche:
Là, on distingue plusieurs possibilités.
- Sur le Domaine Public de l’Etat.
Pour la pêche de loisir, nous rappelons que l’Etat loue son droit de pêche par lot, soit à des AAPPMA pour le droit de pêche à la ligne soit individuellement pour le droit de pêche aux engins et filets.
En conséquence, l’autorisation ou la permission du détenteur du droit de pêche se matérialise soit :
- Par la carte de pêche à la ligne.
- Par la licence individuelle de pêche.
Par ailleurs, sur tout le Domaine Public de l’Etat, la loi autorise, à tous les membres d’AAPPMA ou d’ADAPAEF de France, l’exercice du droit de pêche banale, celle-ci étant définie comme la pêche à une ligne, quel que soit le mode de pêche à la ligne pratiqué à l’exception de la pêche au saumon pour laquelle il existe une réglementation spécifique là où elle est autorisée.
- Sur les domaines n’appartenant pas à l’Etat.
Les propriétaires peuvent :
- Soit louer leur droit de pêche à une AAPMA (ou leur rétrocéder gratuitement ce droit), qui permettent alors à leurs adhérents de pêcher sur ces lots via la vente de cartes de pêche,
- Soit louer le droit de pêche à un particulier ou une personne morale, qui pourra en lui-même exploiter ce droit de pêche,
- Soit tout simplement en garder la jouissance.
Le propriétaire gère donc son droit de pêche comme il l’entend.
Il faut noter que les APPMA peuvent si elles le souhaitent accorder les droits de pêche qu’elles détiennent aux membres d’autres associations agréées, sous réserve de réciprocité.
- Respecter la réglementation:
La réglementation se décline sous forme :
- Nationale par le Code de l’Environnement.
- Départementale puisque le préfet dispose de moyens juridiques importants pour réglementer l’exercice du droit de pêche au moyen de l’Arrêté Réglementaire Permanent et des clauses techniques particulières dans le cahier des charges.
- Interne aux associations par le biais de règlements intérieurs. Cette dernière réglementation ne s’applique qu’aux membres de l’association, ce qui peut poser un problème en cas de réciprocité.